jeudi 23 mars 2017

Oser la transparence

La personne et le personnage
Il y a deux facettes de soi chez la plupart des êtres humains : la personne véritable, l’Être profond, et le personnage dont un synonyme pourrait être : le paraître. Nous pourrions dire que nous connaissons relativement bien le deuxième mais que nous avons peu ou pas conscience du premier. Au début de son périple d’incarnation, la personne sait dans la profondeur de son être, qu’elle est une goutte d’eau unique et parfaite qui baigne dans un océan d’amour infini. Cependant, elle déchante rapidement quand elle se trouve confrontée à la réalité terrestre, relativement dépourvue de cet amour infini.

Dans ses premières années de vie, elle créera un personnage qui aura pour mission de quêter des bribes d’amour pour se nourrir car elle se rendra compte assez vite qu’elle doit louvoyer intelligemment pour survivre. Elle adoptera différentes stratégies dans différentes situations et avec différentes personnes pour se sentir aimée. Ces stratégies qu’on pourrait qualifier de mécanismes de survie, deviennent rapidement des mécanismes de défense, des espèces d’armures protectrices pour éviter d’être blessée et espérer en même temps, recevoir des miettes d’amour. Ce personnage est véritablement utile à cette époque, car un enfant est tellement fragile, une véritable éponge émotive qu’un rien peut bouleverser. Précisons ici qu’il n’est aucunement question de rejeter quelque faute que ce soit sur qui que ce soit et surtout pas sur nos parents qui ont fait ce qu’ils ont pu, avec ce qu’ils étaient. Il nous faut accepter qu’ils avaient eux aussi dans leur enfance, mis en place un personnage dédié à leur survie et qu’ils ont, comme la plupart des gens, oubliés d’enlever cette armure à un moment donné dans leur vie.

Avec votre petit bonhomme de trois ans, vous faites des courses de dernières minutes, au centre commercial, la veille de Noël. Il y a un monde fou, c’est la cohue, vous êtes stressé et tout d’un coup, vous échappez la main de votre enfant qui marchait à vos côtés. L’évènement ne dure que quelques secondes, mais vécu comme une éternité pour le petit bonhomme qui panique et se sent perdu dans une forêt de jambes. Vous le retrouvez presque immédiatement. Il a peur, il pleure. De deux choses l’une, vous le consolez en le prenant dans vos bras tout en validant son émotion, vous vous excusez de l’avoir échappé et vous lui promettez que ça n’arrivera plus. A ce moment, l’enfant sèche ses larmes, passe presqu’instantanément à autre chose et l’événement n’aura pas de conséquences fâcheuses. Dans l’autre scénario, vous lui faites des remontrances en lui disant de ne plus vous lâcher la main, vous banalisez son émotion: - Arrête de pleurer, tu n’es plus un bébé ! À ce moment, un sentiment d’abandon peut s’installer et perdurer une bonne partie de sa vie.
Vous trouvez que j’exagère ?

Sophie me consulte à 17 ans parce qu’elle est mal dans sa peau. Au cours de l’entrevue, je lui raconte ce scénario inventé de toutes pièces et que je raconte souvent à mes clients pour illustrer la fragilité d’un enfant. Elle me regarde ébahie en me disant que c’est exactement ce qui lui est arrivé à l’âge de trois ans. Son réflexe de peur avait été à ce moment, d’agripper la première jambe à sa portée. En levant la tête, elle a constaté que c’était la jambe d’un monsieur inconnu et elle a eu honte ! Vous conviendrez avec moi que la honte n’est pas un sentiment habituel chez une enfant de trois ans. Deux ans plus tard, jouant avec d’autres enfants, elle bouscule malencontreusement une fillette plus jeune qui se fait mal en tombant. Les adultes présents lui font des remontrances et ce sentiment de honte refait surface. À partir de ce moment, Sophie a mis en place son personnage et développé toutes les stratégies possibles pour ne plus être confrontée à cette honte dévalorisante. Elle a fait en sorte que son personnage réponde à toutes les demandes de l’environnement pour qu’il n’ait plus jamais rien à lui reprocher, quitte pour cela à renier ses propres besoins et aspirations. Aujourd’hui, à 17 ans, elle ne veut plus jouer ce rôle et consulte pour ce défaire de ce sentiment qui pourrit littéralement sa vie.

Je le répète, ces mécanismes de survie ont été essentiels à une époque donnée. Le problème est qu’en grandissant, en acquérant une expérience de vie qui nous fortifie, nous oublions d’enlever ces armures qui nous alourdissent et ces masques qui font qu’on ne reconnait pas sa véritable personne en se regardant dans le miroir. Le conflit intérieur ainsi engendré est responsable de la plupart de nos mal-être et mal-a-dit car comment pouvons-nous créer notre vie et nous réaliser, en jouant constamment un rôle qui ne nous convient plus ? Bien sûr, en général nous ne sommes pas conscients de cette pièce de théâtre qui se joue et dont le scénario a été écrit il y a fort longtemps. Le mal-a-dit est là pour essayer de nous rappeler d’en changer, de retrouver la vraie personne que nous sommes et qui va mieux correspondre à la réalité à laquelle nous aspirons. 

Je vous suggère ici, le moyen le plus performant quoique le plus risqué, pour vous unifier : oser la transparence ! Risquer l’authenticité ! Car il s’agit bien de prendre des risques. Risquer d’être nous-mêmes va bousculer tout notre environnement qui se sentira insécurisé par notre transformation. Étant donné que nous sommes attachés à notre personnage et à notre environnement, nous devrons accepter de vivre de multiples deuils et probablement une certaine solitude car nous n’aurons plus notre place dans la pièce de théâtre que nous jouions jusqu’à maintenant. Tenter de devenir qui nous sommes vraiment, c’est se rapprocher de notre essence divine, c’est développer le courage de se détacher totalement, de se pardonner réellement et de retrouver la satisfaction de vivre ici et maintenant, dans la joie, la paix et l’harmonie de l’Éther.

La difficulté est de savoir qui nous sommes vraiment et les informations que je vous partage dans mon livre vont en ce sens. Plus nous nous introspectons, plus nous faisons confiance à notre ressenti, notre petite voix intérieure, plus nous questionnons nos modes de réaction, plus nous reconnaissons la personne que nous sommes, plus nous faisons preuve d’authenticité et plus nous nous rapprochons de nous-mêmes et de cet océan d’amour infini. Les voies de guérison sont multiples et je me permettrai ici de vous suggérer fortement le livre de Colette Portelance, Relation d’aide et amour de soi, qui vous éclairera sur les mécanismes de défense, les patterns et autres masques que la plupart d’entre nous portons, tout en vous faisant découvrir certains aspects de votre personne qui contribueront à vous réconcilier avec vous-mêmes. 

Extrait du livre Guérir sa vie avec la Polarité, Éd. de L'Apothéose

lundi 6 mars 2017

La douleur chronique

Depuis quelque temps déjà, ma pensée et mon cœur, sont habités par la souffrance humaine et en fait, par la souffrance de tous les êtres vivants et de la terre elle-même. Je crois sincèrement que rares sont les personnes qui ne vivent pas une souffrance plus ou moins intense, qu'elle soit physique, psychologique ou émotive. Et pour la plupart d'entre elles, la (mauvaise) stratégie consiste à se contracter pour maintenir un semblant de vie acceptable. Plusieurs personnes aussi, totalement inconscientes de leur souffrance intérieure, la font subir aux gens autour d'elles à travers les mécanismes de défense qu'elles ont mis en place, pour justement ne pas ressentir leur douleur.

Dernièrement, j'ai été interpellé par le sujet de la douleur chronique, à cause de quelques émissions de télé et aussi parce que ma fédération professionnelle organise un colloque sur ce problème que vivent de plus en plus de gens.

Dans ces émissions, j'entends parler d'acceptation de cet état, de moyens pour favoriser cette acceptation et de quelques outils visant à diminuer cette douleur. Je dis bravo, car tous les moyens sont bienvenus pour soulager la douleur quand celle-ci nous empêche de fonctionner ou de jouir pleinement de la vie. Cependant, soulager n'est pas guérir et les personnes continuent de souffrir, même si peut-être à un moindre degré ! Je n'entends jamais parler dans les médias officiels, de la possibilité de se libérer totalement de cette douleur. Et pourtant, la possibilité existe ! Plusieurs personnes très souffrantes que j'ai eu le privilège d'accompagner au cours de mes plus de trente années de pratique de la Polarité ont réussi, avec beaucoup de courage et une grande volonté de débusquer en elles la douleur émotive, à se libérer de la douleur physique.

Il faut savoir que tout blocage d'énergie dans l'un ou l'autre des éléments qui nous constituent soit l'Éther, l'Air, le Feu, l'Eau et la Terre, va se retrouver un jour dans cette dernière. Le corps physique gouverné par l'élément Terre, est la résultante de tout ce qui se vit dans les énergies plus subtiles. La cause véritable des douleurs et maladies ne s'y trouve donc pas et n'intervenir qu'à ce niveau pourra peut-être soulager, mais apportera rarement la véritable guérison.

Presque toutes les douleurs physiques proviennent d'une retenue de l'élément Feu qui dit: Je crée ma vie ! Henri Laborit décrivait ce phénomène comme étant l’inhibition de l'action. Cette retenue de la création de sa vie cause évidemment une frustration profonde qui se cristallise et à la longue, finit par être exprimée par le corps. Identifier cette frustration et surtout remettre en mouvement cette inhibition en posant une action, relance la circulation de vie.

La plupart des personnes qui vivent avec de la douleur chronique disent évidemment qu'elles veulent  guérir et certaines sont même très proactives en consultant divers professionnels, en s'informant à droite et à gauche. Pourtant, malgré divers traitements, médicaments, produits naturels et autres, elles sont toujours aux prises avec leur problème ! En fait, elles souhaitent arrêter de souffrir, ce qui n'est pas la même chose que le vouloir de l'Air. Dans le souhait, on espère le miracle, la guérison comme par magie. Le JE VEUX est plus déterminé et déterminant, il implique que l'on récupère et actualise son pouvoir personnel. 

La douleur est à l'intérieur, et plonger en soi pour tenter d'identifier l'ex-motion demande une bonne dose de courage, d'honnêteté envers soi-même et d'humilité. C'est cependant le seul moyen pour libérer l'é/motion, favorisant ainsi l'action juste du Feu qui mène à la guérison. C'est à ce moment que se produit la véritable magie, car c'est l'âme (qui) agit ! Le JE VEUX de l'Air libère la puissance guérissante de l'Amour. Amour de soi d'abord et amour qui rejaillit ensuite forcément sur l'environnement.

À mes clients qui trouvent difficile de se responsabiliser face à leur souffrance, de s'observer, de se questionner, de cultiver la vigilance, je pose la question: Est-il plus facile de souffrir ? Ils acquiescent généralement à mon point de vue, silencieusement, en hochant la tête, mais je lis souvent une certaine impuissance dans leurs yeux face à une tâche qu'ils jugent titanesque. Vous connaissez l'expression qui dit: mettre l'épaule à la roue ? Hé bien, au début la roue est plus carrée que ronde et elle demande évidemment un gros effort pour la faire rouler, mais plus vous poussez dessus, plus les coins s'usent et plus elle tourne facilement, jusqu'à avancer presque d'elle-même.

En terminant, car vous allez certainement poser la question, qu'advient-il des personnes qui souffrent de douleur chronique suite à un accident, une opération, ou un quelconque traumatisme ? Je vous répondrai que le hasard n'existe pas et qu'il devait forcément y avoir une inhibition intérieure, une ex-motion cristallisée, antérieure à l'événement pour que le corps la manifeste de cette façon. Malheureusement, quand le corps physique (la Terre) est vraiment hypothéqué, le retour en arrière est plus difficile, voire impossible. Cependant, conscientiser l'ex-motion que vous viviez dans les moments précédents cet accident pourra possiblement vous procurer un certain soulagement et certainement prévenir un autre épisode du genre... si vous prenez la décision de remettre cette énergie en mouvement. 

* Pour en apprendre plus sur les éléments et leur interaction, voir l'onglet Le corps sait sur mon site web ou mieux encore, procurez-vous mon livre Guérir sa vie avec la Polarité qui contient plusieurs histoire de vie qui peut-être, ressemblent à la vôtre.

Vous avez encore quelques instants à vous consacrer ? Je vous encourage à lire ce très beau texte qui m'a touché au plus haut point à l'époque et qui me touche encore aujourd'hui à chaque début de formation quand j'en fais la lecture à mes élèves. Il a été le déclencheur de la prise de conscience la plus importante de ma vie. Merci Michel de l'avoir formulé de si belle façon. 
  

LE BONHEUR D'ÊTRE THÉRAPEUTE

PAR MICHEL PRUNEAU

Lorsque, dans les années 70, les études scientifiques du professeur Henri Laborit ont démontré que la maladie était résultat physiologique de l'état d'inhibition de l'action, j'étais un adolescent en pleine crise existentielle. Ne sachant plus ce que je faisais dans la vie, au sens propre et au sens figuré, je percevais le monde comme un vaste mensonge, une course à obstacles où s'agitaient les esprits et les corps pour oublier la mort. Je ne connaissais pas encore les travaux de Laborit, mais je connaissais de l'intérieur l'état d'«inhibition de l'action».

Un jour, une amie m'a demandé de l'accompagner chez son acupuncteur. Dans un état de fébrilité que je ne comprenais pas.je me suis retrouvé chez Jean-André Pierre, un acupuncteur d'origine française. Cette rencontre fut déterminante. J'étais assis dans le bureau de cet homme rayonnant et j'éprouvais de la fascination pour la qualité de son écoute, pendant que mon amie expliquait ses maux. Je me souviens clairement du calme de cet homme qui savait être en paix au cœur de la douleur humaine. Bien qu'il prît les symptômes physiques au sérieux, je l’ai toujours vu se centrer sur les émotions profondes qui sous-tendaient ces malaises. Devant la tristesse ou la rancœur, Docteur Pierre, on l'appelait, possédait une qualité d'accueil qui permettait l'émergence du désir de croître.

Lors de nos rencontres subséquentes, un phénomène se produisit que je n'oublierai jamais: comme si son âme était plus vaste que mon angoisse, j'ai compris alors qu'il était impossible de faire disparaître l'impression de vide qui m'habitait. Toute l'angoisse résidait dans mon refus de cette sensation. Il ne me restait plus qu'à habiter ce vide, comme le font les maîtres zen. De malade énergétique que j'étais, je suis devenu privilégié. Hippocrate disait qu'un thérapeute est un médiateur entre le monde des dieux et celui des hommes. Si Docteur Pierre avait eu peur de mon angoisse, si le vide de sens ou l'absurdité de la mort lui avaient été étrangers, il aurait utilisé son arsenal énergétique pour faire disparaître mon état, dérangeant pour lui. Lorsque le Docteur Pierre mourut d'un cancer des os, je suivais alors une formation en massothérapie et en acupuncture. Je réalisai qu'une grande âme de thérapeute n'est pas à l'abri de la vie et de la mort mais que, bien au contraire, elle s'y plonge tout entière. 

Quelques années plus tard, j'accueillais un de mes premiers clients, un homme âgé, aux prises avec une difficulté respiratoire diagnostiquée comme étant un début d'emphysème. Je tentai de lui venir en aide par un traitement approprié, mais ce fut sans effet, jusqu'au moment où je pris le risque d'entendre cet homme. Au cœur de son expérience d'inhibition se trouvait un profond sentiment d'inutilité sociale, d'impuissance et d'angoisse devant la mort; mais il refoulait son drame. Sa tristesse, son désespoir et le caractère étouffant de ces émotions me poussaient à me retrancher derrière ma compétence de thérapeute.

Ce désespoir me renvoyait à l'image de mon grand-père, et l'anxiété que je ressentais témoignait de ma propre angoisse de la mort. J'avouai au vieil homme le rapprochement que je faisais, et le sentiment que cela provoquait en moi. Il se mit à pleurer, doucement d'abord, puis à sanglots par la suite. J'ai reçu sa peine avec la curieuse impression qu'une partie de moi, liée à mon grand-père décédé, se libérait. Après quelques minutes, et quelques soupirs, il me dit: «Depuis que je ne suis plus un enfant, je n'avais pas pleuré. Ça fait longtemps que je n'avais pas respiré aussi bien.»

Le travail du thérapeute consiste à débusquer l'inhibition, en soi d'abord. Chaque symptôme est une énigme qui cache la voie vers un trésor du cœur, atteignant aussi la vie intérieure du thérapeute, quelle que soit la médecine qu'il pratique. Récemment, je recevais en consultation une femme d'une soixantaine d’années qui se plaignait d’une douleur au genou. Par ailleurs, l'inhibition dont elle souffrait était liée à une difficulté relationnelle avec son mari. Elle était dominée par lui et ne possédait ni autonomie financière, ni liberté d'action. Il aurait été bien plus facile de ne pas voir cette réalité sous-jacente, et de perpétuer le pouvoir mâle en intervenant sans rechercher le sens de la douleur. C'eût été d'ailleurs la voie rentable financièrement: me taire, utiliser mon pouvoir et traiter.

J'ai choisi de parler, mais, ma patiente refusa net mes théories. Elle ne pouvait accepter qu'il y ait un lien entre sa douleur au genou et sa situation conjugale. Elle me dit un peu sèchement que mon bureau était bien loin de sa résidence et qu'elle me téléphonerait pour un prochain rendez-vous. Avant qu'elle ne me quitte, je lui souhaitai de réaliser ses rêves, que sa santé y était intimement liée. Elle me téléphona deux mois plus tard et me dit d'un air joyeux: "Vous aviez raison en ce qui concerne les rêves. Une amie vient de me proposer une fin de semaine dans une auberge de santé et j'ai dit oui, sans même demander la permission à mon mari. Je voulais vous remercier.»

J'ai failli lui demander comment allait son genou mais, par bonheur, j'ai réussi à me taire. La santé n'est pas dans le genou, et elle ne m'en avait pas parlé. En raccrochant.je sentais que l'humanité venait de faire un pas. Je me sentais plus libre.

Michel Pruneau est responsable de l'École de santé holistique du cégep Marie-Victorin ainsi que du programme de formation professionnelle en massothérapie et relation d'aide. Il est également auteur de : La santé n'est pas l'absence de maladie (1988) et Cœur de père (1990), parus chez Libre Expression.

Guide Ressources, juin 1995